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Les Hommes et le désert


Dieu a créé un pays plein d’eau pour que les hommes puissent vivre et un pays sans eau pour que les hommes aient soif, et il a créé un désert : un pays avec et sans eau, pour que les hommes trouvent leur âme » Proverbe Touareg (1)

Bien sûr un pays plein d’eau, pour pouvoir répondre à nos besoins, les besoins de notre corps. L’eau c’est la vie, sans laquelle rien n’est possible.

Et un pays sans eau,

pour créer le manque, le manque sans lequel il n’y a plus de mouvement, plus de désir, plus de vie.

De par cette formidable structure psychique de l’individu, structure universelle, c’est ce manque, ce « manque à être » (2) qui va susciter la demande et convoquer l’énergie afin que l’on puisse, chercher, grandir, s’élever et aller plus loin dans la découverte de son être profond.

Là où pour « l’organique », le vide crée un mouvement pour être rempli et répondre au besoin, pour le psychisme, le manque va déclencher le désir(3), cette soif de se trouver soi-même.

C’est de cette soif, « manque d’être » de « l’être parlant » (4) qui arrive avec sa jouissance, dont se sert la psychanalyse, pour relier le patient à son inné, l’amener vers sa réelle place, et établir ce lien porteur de sens entre soi et les autres, dans une pulsion de vie.

Dans la spiritualité, le manque prend une autre dimension.

Le désert, « pays avec et sans eau » n’est que métaphore d’un dépouillement, qui force à chercher, à être à l’écoute de ce qui nous entoure, à percevoir, à ressentir, à comprendre et à trouver son âme.

Permettre « aux hommes de trouver leur âme »,

c’est les élever, au travers de ce manque, à une dimension spirituelle, vers la perception (un état de conscience) d’un lien, d’une connexion entre chaque être et chaque chose, de l’infiniment grand à l’infiniment petit. Le « Tout » (5) de l’univers. Ce lien, porteur de sens, où chacun dans son unicité, a sa place dans ce qui compose l’entièreté du monde.

C’est aussi les conduire à accepter leur place, à accepter l’inaccessible, propre ou commun à chaque être.

C’est cette acceptation qui amène un état de plénitude.

Pour autant, si la spiritualité recouvre pour chacun une notion différente et personnelle, elle reste, sur la base de ce manque, inhérent à l’être humain, une quête de sens, dans une pulsion de vie.

Dans cette recherche de connexions, de liens et de sens, commune à la psychanalyse et à la quête de spiritualité, se trouve l’élévation de l’être humain vers des relations justes et harmonieuses.


Viviane Dumas

 

Source

  1. Livre de Jean Luc Maxence « l’appel du désert : Charles de Foucaud, Antoine de Saint-Exupéry »

  2. J. Lacan – Le Séminaire Livre II Le Moi - pages 209-210

  3. J . Lacan Le Séminaire Livre VIII Le transfert – page 203

  4. « Jacques Lacan parle du langage et de l’être » Conférence de Louvain 1972

  5. Œuvres philosophiques de Descartes Editions de Ferdinand Alquié Classique Garnier

 

 

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